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Revision as of 20:34, 25 May 2009

La loterie

Author: Forestier
Science-fiction. Un bon moyen d'assurer une véritable égalité des sexes.

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C'était le matin du premier jour de leur congé décadaire, et Marc et Chantal faisaient la grasse matinée. Et comme ils constituaient un jeume couple, on comprend bien ce que ça veut dire...

Ils étaient ensemble depuis près de deux ans, et cela allait plutôt bien. Tous deux en fin de vingtaine, Chantal enseignait les mathématiques et les sciences dans une école secondaire, et Marc enseignait au primaire. Comme de raison, ils se connaissaient depuis l'université, mais ce n'est que lors d'un séjour de vacances dans dans une base de plein air proche de la ville où ils vivaient qu'ils s'étaient vraiment remarqués. Et ils filaient maintenant le parfait amour dans leur petit appartement, au point où Chantal rêvait de plus en plus de bébé.

C'était donc le matin. Ils se levèrent enfin; Marc mit en marche le café et ils allèrent se laver l'un l'autre dans l'espace-bain. Chantal resta ensuite se laver le cheveux, alors que Marc dressait la table.

Il prit ensuite son bloc-communication pour lire les nouvelles du jour et son courrier. Parmi ce dernier, une lettre lui fit perdre ses couleurs. Dès que sa blonde sortit de l'espace-bain, il lui dit tristement:

— Voilà, c'est notre tour.

— Notre tout de quoi?

— De participer à la loterie. Nous sommes convoqués pour aujourd'hui.

La loterie. La peur de bien des jeunes couples.

— Mais on a cinq chances sur six de revenir comme on partira, non? C'est quand même bien, fit Chantal, pour se rassurer.

— Ouais, cinq chances sur six, c'est bien ça, répondit Marc, pas vraiment rassuré.

Ils avaient perdu l'appétit et touchèrent à peine leur déjeuner. Chantal se décommanda pour une activité avec des amis, puis ils se regardèrent tristement. Je devrais lui faire l'amour encore une fois, se dit Marc, mais l'envie n'y était pas.

Quand il fut temps de partir, les deux tourtereaux s'habillèrent et descendirent prendre leur vélos. C'était l'hiver, et le trajet jusqu'à la véloroute couverte était parfois difficile. Ils devaient se rendre un peu à l'écart de la ville, sur les anciens terrains universitaires où le centre d'échange avait ses locaux.

Ils étaient une soixantaine de couples. Avec quelques gardes. Certains étaient sereins, mais la plupart, ou bien respiraient la tristesse et la résignation, ou bien affichaient une exubérance de façade. Marc avisa un couple de leur connaissance. Les quatre tentèrent de converser comme si de rien n'était, mais les meilleures blagues tombaient toutes à plat.

Finalement, les responsables entrèrent et tout le monde s'assit.

— Mes amis, je sais que vous êtes tous anxieux et que personne d'entre vous ne désire être ici. Mais vous savez à quel point la loterie est importante dans notre société. Pas seulement la nôtre, mais toutes les loteries. C'est le meilleur moyen que nous ayons trouvé d'attribuer les meilleurs logements et même certains emplois, et elle fait en sorte que personne ne soit lésé pour des raisons de discrimination. Mais notre loterie, vous le savez toutes et tous, a mis fin à une des plus grandes discriminations de tous les temps. Depuis son institution, plus personne ne peut plus plus, à moins d'avoir perdu la raison, discriminer ceux dont il peut faire partie demain ou dont il a fait partie hier. Personne n'aime risquer son destin, mais, si ça peut vous rassurer, tous les responsables de la loterie en sont, si on peut le dire ainsi, des perdants. Nous avons tous été désignés par le sort et nous n'en sommes pas plus malheureux. Mais foin de discours. On vous a tous remis, à l'entrée, un disque avec un chiffre, entre un et six. Veuillez le sortir.

Tous s'exécutèrent.

— Eh bien, aujourd'hui, nous allons procéder au changement de ceux qui ont le chiffre... il pigea dans un pot... le chiffre deux.

La plupart sautèrent de joie, dont un couple qui avait le deux. Les autres pâlirent davantage, et certains essayèrent de s'enfuir, mais les portes avaient été fermées et des gardes surveillaient les participants.

Marc et Chantal avaient le deux.

— Si les désignés veulent bien passer par ici. Les portes seront rouvertes quand tous les heureux élus seront sortis. Merci bien de votre collaboration.

S'il y a une chose que la nouvelle société avait su développer, c'était l'obéissance. Il y avait peu de lois, et toutes avaient des raisons que chacun comprenait. Alors, on obéissait. Avec les autres, Marc et Chantal pénétrèrent dans le corridor. Une hôtesse les conduisit dans une petite pièce d'allure plutôt sinistre, tout en métal. Il fallait isoler les appareils. Et dire que Chantal avait des étudiants qui attendaient avec impatience leur majorité pour pouvoir venir justement ici, de leur plein gré et pas dans le cadre de la loterie! C'en était tragique.

Elle regarda son époux avec amour. C'était la dernière fois qu'elle pourrait le voir ainsi. N'y tenant plus, elle se précipita vers lui et l'étreignit aussi fort qu'elle le put. L'hôtesse les laissa faire — elle n'était pas un bourreau — puis les conduisit chacun vers un lit. Elle leur donna à chacun un calmant.

— Voilà, le temps est venu. Bonne chance.

Les lits glissèrent dans une énorme machine. Marc et Chantal sombrèrent dans l'inconscience.

Après quelques heures, ils se réveillèrent enfin. Ils étaient couchés ensemble, dans le même lit. Les calmant devait encore agir, car, lorsqu'ils se virent, ils ne crièrent pas.

— C'est bien toi, Marc?

— Oui... Chantal?

— Oui, c'est moi.

Ils s'aidèrent pour se lever, puis allèrent au miroir placé contre un mur. Un grand miroir, où ils pourrait se voir au complet.

L'hôtesse revint avec une brochure. Marc et Chantal interrompirent leur exploration.

— Tout s'est passé à merveille. Comme toujours, je dois dire. Voici une brochure qui explique les démarches que nous avons effectuées pour vous, celles qu'il vous reste à faire et qui propose quelques trucs pour mieux vous acclimater. Je vous recommande d'attendre encore une demi-heure avant de partir, de manière à ce que les effets du calmant soit complètement dissipé. Les toilettes sont juste là. Et je vous souhaite bien du plaisir dans votre nouvelle vie.

Oui, les toilettes! Marc et Chantal se rendirent compte qu'ils avaient besoin d'y aller. Malgré leur intimité, ils avaient aujourd'hui une pudeur nouvelle, et chacun ferma la porte. Chantal s'y attarda, et Marc dut frapper à la porte et lui demander de faire vite.

Le retour fut sans histoire, aucun des deux ne réalisant sans doute pleinement ce qui venait de lui arriver. Devant les vélos, ils sourirent. Ils étaient bien sûr là tous les deux, non verrouillés, chacun réglé à la taille de son propriétaire. Chantal prit celui de Marc, et Marc, celui de Chantal. Celle-ci dut faire attention de ne pas coincer ses testicules contre la selle, et celui-là se sentait inconfortable avec son soutien-gorge.

Il leur faudrait avertir leurs amis de l'échange, changer leurs activités et se préparer à affronter leurs élèves et leurs collègues. Mais la brochure, qu'ils avaient lue avant de partir, était claire: la première chose pour habiter leur nouveau corps était l'amour. Ils en avaient un peu peur, tout en trouvant l'idée excitante. De retour chez eux, ils se déshabillèrent. Le corps de l'autre n'éveillait bien sûr en eux aucun désir, mais chacun connaissait les points sensibles de leur «nouveau partenaire». Tendrement, mais avec le manque d'assurance d'adolescents puceaux, ils se caressèrent. Chantal d'abord, puis, quand Marc commença à se sentir langoureuse, elle entreprit de masser Marc, lui effleura la poitrine avec ses seins dressés, puis prit, avec un peu de dégout, c'est vrai, mais il faut ce qu'il faut, non? son ancien pénis. Il lui fallut encore quelques minutes pour se sentir prête à l'accueillir, mais tout se passa bien. Très bien même.

Le lendemain matin, au réveil, ils furent d'abord un peu surpris, mais ils remirent bientôt ça. Chantal parlerait plus tard du bébé qu'elle ne porterait pas.